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jeudi 31 janvier 2019

Archimandrite Kyrion [Oniani]: Interprétation du Psaume 50 et de la Parabole des Dix Vierges par saint par Gabriel Fol-en-Christ de Géorgie


Je voudrais ici vous offrir un de mes souvenirs, qui révèle clairement la mesure de son amour et la hauteur de sa stature spirituelle.

Le matin, dès que je me suis réveillé, j'ai pensé au Père Gabriel et j'ai décidé d'aller le voir.

En entrant dans le monastère de Samtavro, j'ai prié dans la petite église en l'honneur de sainte Nino et aussi dans le grand catholicon [1] du monastère, après quoi je me suis dirigé vers la cellule du Père Gabriel. J’ai gravi les escaliers qui menaient à la cellule du staretz et aux logements des moniales. Les deux portes de la cellule étaient ouvertes, et à l'intérieur, sur une chaise basse, était assise Mère Parascève qui souriait tandis qu’elle me regardait. Alors que j'allais ouvrir la bouche pour demander la bénédiction d'entrer, Mère Parascève s'avança devant moi et informa le Père Gabriel de mon arrivée. Puis elle me dit de rester devant la porte.

"Entrez, qu'est-ce que vous cherchez ?"

Je n'ai pas hésité, mais je suis entré à l'intérieur. Je tenais dans mes mains un petit sac rempli d'aliments divers. Presque tous les visiteurs apportaient de tels cadeaux pour les startsy avec une grande joie, et ce, à cause de leur grand amour pour le Père Gabriel. Car ils avaient tous compris qu'il était un grand trésor dans leur vie. Quant au Père Gabriel, c'était un hôte vraiment généreux. Il recevait de tout cœur chaque visiteur avec des bénédictions et avec un repas qu'il préparait habituellement lui-même, ou qui était préparé par ceux qui lui étaient dévoués. Il était rare qu'un visiteur qui venait deux, trois ou quatre fois ne reçoive pas un tel repas. En fait, c’était tout aussi rare qu'un visiteur qui venait une seule fois ne soit reçoive pas quelque chose - au moins un petit quelque chose de la table du bienheureux staretz. Lorsqu'il recevait quelqu'un, il le suppliait de s'asseoir pour manger de telle sorte que, malgré leur satiété, ils ne pouvaient s'empêcher de goûter afin de mettre le cœur du staretz à l'aise. Que l'invité mange beaucoup ou peu, le staretz se réjouissait comme un petit enfant parce que son invité avait mangé à sa table et qu'il était rassasié.

Je vais maintenant continuer avec ce que j'ai à dire. J'ai donné mon sac à Mère Parascève et en m'approchant du Père Gabriel, je me suis prosterné et lui ai dit : "Béni Père !" Il m'a béni avec son sérieux habituel et m'a fait signe de m'asseoir sur une chaise à proximité. Je voudrais ici m'éloigner du sujet de mon récit et dire quelques mots sur les prières et les bénédictions du Père Gabriel. Jamais, depuis que j'ai rencontré le Père Gabriel, je ne me souviens du staretz qui aurait prié ou donné une bénédiction à la hâte, même si beaucoup attendaient qu'il les bénisse. Je ne dis pas que le staretz  laissait les gens attendre longtemps ou que par sa fervente prière il cherchait à créer l'impression de ce phénomène. Le Père Gabriel n'a jamais rien fait d'artificiel, comme s'il cherchait à faire impression sur quelqu'un. Ce n'était certainement pas le cas. Sa grâce et sa puissance intérieures étaient révélées naturellement et ouvertement, et non selon un effort du staretz, ni par aucune tentative ostensible de se faire valoir. Au contraire, il faisait les choses naturellement et d'une manière ordinaire, avec simplicité, et malgré ses grands efforts pour cacher ses dons, ils ne pouvaient pas être cachés. Il était impossible de cacher l'unité du Père Gabriel avec Dieu. Afin d'expliquer plus clairement ce qui est écrit ici, je vais essayer d'expliquer davantage mes réflexions à ce sujet. Je me demande, y a-t-il quelque chose de plus secret, de plus complètement caché que le Saint-Esprit ? Y a-t-il quelque chose de si impossible à voir, non seulement pour les hommes, mais aussi pour les saints anges ? On pourrait dire la même chose de Son serviteur, le grand staretz, qui avait une unité complète avec le Seigneur - ce qui sera discuté plus loin. Cette histoire montrera que le staretz avait acquis l'unité avec le Seigneur dans sa vie terrestre, et la perfection éternelle dans l'autre.

Naturellement, bien sûr, le staretz savait quelle bénédiction ou quel conseil donner à chacun, selon ses besoins. Il ne feignait pas ou ne faisait pas semblant, mais il avait un don vif, non seulement dans des moments ou des circonstances particulières, mais tout le temps. Il disait toujours ce qu'il fallait dire à quelqu'un. Parfois, il se contentait de bénir ; d'autres fois, il mettait en garde contre une épreuve imminente - quelque chose qui entravait le progrès spirituel ou la formation de l'âme. Le Père Gabriel n'avait pas besoin d'être informé d'aucune façon, ni d'entendre une confession ou d'avoir une conversation sur un sujet particulier avec un visiteur. Il percevait tout avec perspicacité et parlait à quelqu'un après l'avoir rencontré pour la première fois comme s'il le connaissait depuis longtemps, et il parlait avec une grande profondeur de sens sur n'importe quel sujet, et il parlait de façon exhaustive.

Dès que dix minutes se sont écoulées depuis que je m’étais assis près de lui, le Père Gabriel s'est tourné vers Mère Parascève en disant : "Va te reposer, et si j'ai besoin de quelque chose, je t’appellerai". Mère Parascève n'a pas attendu longtemps, et après être restée assise pendant quelques minutes, avec la permission du Père Gabriel, elle est allée dans sa cellule. Après le départ de Mère Parascève, quelques instants de silence se sont écoulés et le Père Gabriel m'a regardé et m'a demandé : "Mon cher, voudrais-tu parler d'un sujet spirituel aujourd'hui?" J'étais d'accord avec le staretz souriant, mais en même temps j'étais un peu perplexe, parce que je ne me considérais pas digne de discuter de questions spirituelles avec le Père Gabriel. J'attendais impatiemment de voir ce que le bienheureux staretz allait faire. Il se leva du canapé et ajusta le manteau qui le couvrait. Puis il alluma de l'encens et s'assit sur un tabouret. Après un court silence, il demanda avec sa gentillesse habituelle: "Eh bien, mon cher, dis-moi, si tu le peux, quel psaume tu aimes le plus." Cette question me laissa perplexe, et je ne savais pas comment répondre parce que je n'avais pas de psaume préféré en particulier. Mais comme je devais donner une réponse, j'ai mentionné le fameux Psaume 50 [2], que j'ai récité plus souvent que d'autres, et que, dans une certaine mesure, j'aimais plus que les autres psaumes.

"Oh, alors tu aimes "Aie pitié de moi... Ce psaume se détache vraiment parmi les autres psaumes. Donc, si tu l'aimes, tu dois bien sûr en connaître le sens. Si tu le peux, dis-moi ce que tu penses qu'on entend par " Tu m'as révélé les choses cachées et secrètes de Ta sagesse ".[3]

Dès le début, je me suis rendu compte que je ne pouvais pas donner une réponse suffisante, mais parce que le Père Gabriel m'a dit : "Si tu l'aimes, alors bien sûr tu en connais le sens", j'ai eu honte de dire directement que je ne savais pas, et j'ai donc décidé d'essayer de produire une réponse. Je me suis rendu compte que je souffrais en vain, et au fil du temps, j'ai commencé à me sentir mal à l'aise en hésitant à répondre. J'ai rassemblé mes forces et j'ai dit : "Je ne sais pas, Père." Ne semblant rien remarquer, il m'a souri avec son sourire aimant, ce qui m'a permis de respirer librement. Cela m'a assuré qu'il comprenait que ma réponse était due à une infirmité et non à un désir de tromperie.

Très bien, mon cher, si tu ne peux pas le dire, alors j'expliquerai le sens des mots : " Tu m'as révélé les choses cachées et secrètes de Ta sagesse. " Commençons d'abord par le caché, que le roi David mentionne à juste titre et sagement avant le mot secret, et qui, par sa signification, déclare la merveille de la sagesse de Dieu. Caché signifie le monde spirituel invisible que le Seigneur Bon et Tout-Puissant a créé selon Sa providence et Sa sagesse incompréhensible et établi avant la création du monde visible et de l'homme. Ces deux mondes dans leur unité comprennent la plénitude de la création de Dieu, et l'homme est l'incarnation parfaite de sa plénitude. Dieu, par son inconcevable sagesse, a uni les deux natures en une seule personne, l'être humain : la nature spirituelle supérieure et la nature physique, qui en comparaison avec la nature spirituelle est inférieure.

Avant la Chute, Adam voyait librement, à la fois le monde physique et le monde spirituel. Parmi ceux-ci, la sagesse et la majesté de Dieu se manifestaient de façon plus grande et étaient perçues dans la vision des demeures célestes du Seigneur : le monde spirituel. Adam l'a vu avant la Chute, et par la suite, cette vision lui a été cachée ainsi qu'à toute l'humanité et elle est devenue cachée. Elle nous a été donnée pour la contemplation, mais elle nous a été enlevée. Le péché, la désobéissance et la transgression de la Parole de Dieu nous ont privés de cette vision divine. Mais par la grâce de Dieu, cette vision fut de nouveau accordée à ceux qui en étaient dignes en raison de leur sainteté particulière et de leur vie vertueuse. Tu vois, mon cher, la sainteté est nécessaire pour qu'une personne reçoive à nouveau la vision de ce qui est caché (le monde spirituel), une vision qui, depuis la Chute, nous a été enlevée et refusée. C'est un héritage merveilleux par lequel nous pouvons contempler et expérimenter la sagesse de Dieu. Je pense que c'est assez concernant le caché, si c'était compréhensible, mon cher..."

"Oui, je comprends tout, mon père," répondis-je.
"Alors disons quelques mots sur la chose la plus intéressante qu'on appelle secret. Ce qui est secret est le sein de la connaissance secrète de la sagesse de Dieu, qui est révélée aux hommes exclusivement par la miséricorde et la providence de Dieu. Elle est révélée à ceux qui, constamment et graduellement, selon leur force et avec l'assistance et l'aide de l'Esprit Saint, se rapprochent des mystères supérieurs de Dieu, et qui, ayant appris ces mystères, deviennent plus sages dans la connaissance de Dieu, des anges et des hommes. C'est une chose de voir et d'entendre ; c'en est une autre de comprendre profondément le mystère de ce que l'on a vu et entendu. Ce qui est secret n'est pas compris de la même manière que ce qui est caché. Car la perception du caché est de voir et d'entendre, tandis que la contemplation du secret est de saisir le mystère de ce qui a été vu et entendu. Le secret n'est pas perçu de la même manière que le caché. C'est parce que le secret ne peut être découvert que par l'action guidée du Saint-Esprit. Pour que les portes révélant la connaissance du secret s'ouvrent, une personne a besoin non seulement de sainteté, mais aussi de mérite devant Dieu. Une personne acquiert le mérite en endurant de nombreuses petites et grandes tribulations, épreuves, persécutions, injustices, moqueries, condamnations, labeurs, sueurs et efforts... endurant tout cela avec amour et humilité pour le Seigneur et Son Saint Evangile. Une vie sainte devant Dieu, comme nous l'avons déjà dit, accorde à une personne la vision de ce qui est caché, et si le mérite est combiné avec une vie sainte, le secret est également révélé. C'est pourquoi j'ai dit au début de notre conversation que le roi David a mentionné avec justesse et sagesse ce qui était caché avant le secret. Car c'est en luttant qu'un homme atteint d'abord la frange ou le seuil de la sainteté, et c'est en s'élevant vers des niveaux supérieurs qu'il obtient la vision de ce qui est caché. S'il reste dans une lutte diligente, il obtient grâce aux yeux du Dieu miséricordieux et Ami des hommes, il recevra de Lui la connaissance du secret comme un don.

L'homme qui est plongé dans la connaissance du secret reçoit des révélations en fonction de ses capacités. Puis il se consacre de toutes ses forces à cette contemplation, ne pensant à presque rien, même aux besoins les plus naturels, puisque cet état lui est si agréable. Il s'efforce d'observer avec toute sa capacité, et ce qu'il voit avec son nous [esprit, intellect] est soigneusement discerné pour la connaissance. Dans cet état apparemment tendu, la personne n'est ni fatiguée ni troublée, mais elle est revêtue d'une grande patience. C'est parce que son âme est dans un état de grande paix dans l'attente de la révélation du secret. Une telle contemplation est pour elle un grand délice, tandis que la révélation et la compréhension de ce qu’elle voit est une joie et un bonheur inexplicables. Tout cela, mon cher, est accordé à un homme qui a atteint les plus hautes vertus, qui selon saint Jean de Climaque sont la foi, l'espérance et l'amour. En effet, ce sont les vertus les plus élevées, comme je l'ai mentionné, car elles forment le dernier échelon de l'échelle des vertus.

Et pourtant, même si une personne fait l'expérience de cette félicité suprême, elle n'est pas encore complètement rassasiée et ne cesse de chercher auprès de Dieu cette grâce et une union plus profonde et inséparable avec Lui. Vient ensuite la théosis [Divinisation], qu'il est impossible d'atteindre par d'autres moyens. La théosis est seulement un don de Dieu... quelque chose d'incompréhensible et d'inexprimable, que le Seigneur accorde comme un don de l'Esprit qui donne la vie à la personne digne des dons de l'Esprit. Ce qu'on attend de l'homme, c'est qu'il travaille et lutte. Dans cette situation, l'homme se consacre à l'humilité, s'humilie impitoyablement et descend au plus profond d'une conscience de sa propre infirmité. Il pleure continuellement, crie et prie Dieu, suppliant qu'Il lui accorde une vie inséparable avec Lui, son Créateur. Alors une flamme d'amour s'allume à l'intérieur de l'homme... une flamme de feu nourrie du feu suprême, le feu éternel qui s'appelle Amour.4 L'homme désire l'unité avec ce feu, mais pas comme une flamme distincte ou séparée de quelque manière que ce soit du feu éternel. L'unité complète désirée avec le feu éternel est la théose. Pour atteindre la théose, l'homme doit renoncer et s'oublier lui-même, et un tel exploit s'accomplit par la supplication et l'austérité intérieure avec soi-même. Il doit aimer chaque personne, voir chaque personne comme un frère et un compagnon. Il doit garder à l'esprit que notre Seigneur Jésus-Christ a souffert pour nous tous. Aimer tous, signifie servir tout le monde avec sagesse.... une sagesse que le Seigneur donne à tous ceux qu'Il regarde et enveloppe de son amour parfait. Avant d'être uni à Dieu, l'homme se trouve dans l'agonie, luttant et cherchant à rester en permanence avec le Seigneur. Lorsque cette unité est réalisée, l'homme fait l'expérience d'un amour marqué par la tranquillité, la paix et le repos. Avant l'union avec Dieu, une personne lutte avec tout son être et cherche une coexistence inséparable avec Dieu. Mais l'union à Dieu est un état d'amour, de grande sérénité, de paix et de repos. Avant l'union avec Dieu, l'existence de l'homme consiste en labeur et en désir, car elle manque de plénitude et de perfection.

L'Échelle de l'Ascension Divine de Saint Jean Climaque détaille l'ascension de l'âme de l'homme, et tout ce qui y est écrit est merveilleux et divin. Cependant, il manque un dernier échelon, qui est la couronne et la perfection de tous, et cet échelon s'appelle Amour et Théosis. Ici, il n'y a que de l'amour, de l'amour et rien de plus. L'homme est entièrement et inséparablement uni à Dieu. C'est une unité parfaite et complète. L'esprit s'arrête, les pensées disparaissent complètement de son esprit, car il ne pense plus à rien. Il ne contemple que Dieu, et ne fait et ne dit que ce qu'il voit et entend de Dieu. Un tel homme possède la sagesse du début à la fin des temps. Ce n'est pas notre affaire de savoir qui a atteint cet état [5], mais nous en connaissons un avec certitude : Saint Jean le Théologien."

Je fus étonné de ce qu'il avait dit, car tout cela me semblait incompréhensible. J'aurais cru me tromper si je n'avais pas entendu une exposition aussi merveilleuse de la bouche du Père Gabriel. Dans la confusion, je me suis dit : comment cela se peut-il - l'esprit s'arrête, les pensées disparaissent... c'est impossible. Incapable de supporter l'incertitude, quand le staretz se tut, je lui demandai : "Pardonne-moi, Père, qu'est-ce que cela signifie - l'esprit s'arrête, les pensées disparaissent complètement de son esprit, car il ne pense plus à rien". Il répondit : "Oui, crois-moi, mon cher, ce qui est impossible à l'homme est possible à Dieu. L'action sûre de l'Esprit Saint, à l'égard de l'homme, est la théosis, qui est l'effusion de la plus haute couronne divine de toutes les vertus - l'amour. Quelle sorte d'union avec Dieu pourrait-il y avoir si le mental est actif ou quand les pensées restent avec vous et que votre mental est retenu captif par une pensée ? L'union complète avec Dieu est impossible sans l'inaction de l'esprit et l'absence totale de pensées. Sinon, il n'y aurait pas de théosis. Cela équivaudrait plutôt à l'échelon supérieur de l'échelle, que Saint Jean Climaque appelle la foi, l'espérance et l'amour."

Ici s'est produit un grand miracle que je n'ai pas compris pendant que j'étais avec le Père Gabriel dans sa cellule. Au cours de notre conversation, j'ai tout accepté comme quelque chose d'habituel et d'ordinaire. La noblesse du discours du staretz se cachait dans son humilité et sa simplicité. Ce n'est qu'après avoir quitté sa cellule que j'ai compris la profondeur et l’ampleur de ses enseignements.

"L'amour ne peut être atteint que si l'esprit s'arrête et est libre de pensées... voici, c'est comme moi..." et alors le staretz frappa doucement la tête avec ses doigts deux ou trois fois. "C'est impossible selon nos propres capacités, mais cela n'est possible qu'avec le Saint-Esprit. Le Saint-Esprit agit sur un homme et rend un tel miracle possible. Seulement, je ne suis pas digne d'une telle grâce... c'est à cause de ma vieillesse que je ne peux pas garder mes pensées et mon esprit est oisif."

Et tout d'un coup, il m'a semblé que quand le Père Gabriel a dit ces paroles merveilleuses : "J'ai ressenti une certaine satisfaction, comme si quelque chose m'avait été révélé... et je n'avais aucune envie de lui demander quoi que ce soit. Ce qui était si étrange, c'est que ce qui m'était difficile à comprendre m'a été révélé avec les coups de sa main sur la tête. C'était comme si le geste du Père Gabriel induisait ce que je percevais dans mon esprit. Quelque chose qui semblait incompréhensible paraissait soudain si plausible. Maintenant, je pouvais comprendre un peu ce qu'il m'avait dit.

"Celui qui a atteint la théosis, mon cher, ne vit pas pour lui-même, mais seulement pour le bénéfice des autres. Avec une grande humilité, il se cache des gens, afin de ne pas les brûler. Car si les gens voyaient qu'il possédait un tel don, ils ne le comprendraient pas correctement, et ils seraient consumés par l'envie. Ou peut-être qu'il leur arriverait de ne même pas être envieux puisqu'un tel phénomène dépasse jusqu'à présent le pouvoir de leur compréhension. Le fait que l'amour soit en fait la couronne de la perfection comme dernier échelon de l'échelle, et que ni cela ni la théosis ne soient mentionnés par saint Jean Climaque, ni que ces choses n'aient été mentionnées par personne par la suite, est selon la providence de Dieu. Dieu me l'a réservé pour que je le dise, et personne d'autre que moi ne pouvait le dire.


L'amour est aussi l'interprétation finale et parfaite de la Parabole des Dix Vierges. Les cinq vierges folles de cette parabole manquaient d'amour. C'est le sens principal de la parabole, et la raison pour laquelle elles ont perdu le salut de leur âme. Les interprétations passées de cette parabole étaient conformes à la providence de Dieu et étaient nécessaires et ont été données en temps voulu. Mais Dieu a réservé cette interprétation pour les derniers temps, afin de nous offrir le message le plus grand, le plus vital à un moment plus nécessaire que jamais. Et Dieu me l'a donné, à moi, le pécheur. Pour qui d'autre que moi, Gabriel, était-il nécessaire de dire cela ? J'ai passé toute ma vie dans la prouesse de l'amour de Dieu et de l'humanité, sans jamais m'épargner des tourments à cette fin. Et si Dieu m'a accordé une telle grâce que je reçois le don de cette parole afin de déclarer à tous que ce que Dieu exige de nous aujourd'hui est l’amour. De toutes nos forces, nous devons nous efforcer d'acquérir cette vertu - l'amour de Dieu et du prochain !"
Le Père Gabriel m'a dit tout cela avec une grande humilité, qui était surtout évidente. Cependant, tout ce qu'il a dit a fait une si grande impression et en même temps a résonné comme quelque chose de puissant et majestueux.

"Au début, saint Jean Chrysostome interprétait la parabole des Dix Vierges comme une leçon sur les bonnes œuvres. Le monde de son temps avait besoin d'une telle interprétation de ce qui manquait aux vierges folles. Car en ce temps-là, Dieu voulait de bonnes œuvres de la part du peuple, et c'est ainsi qu'il cherchait de bonnes œuvres et des travaux de leur part. Plus tard, Saint Séraphinm de Sarov interpréta cette parabole, lui donnant un sens nouveau. Il enseignait que ce qui manquait aux cinq vierges folles, c'était la Grâce de l'Esprit Saint. Par cela, Dieu a appelé l'homme à acquérir la Grâce de l'Esprit Saint. Puisqu'ils avaient alors un tel besoin, le Seigneur bénit les croyants de diriger leur lutte de manière à acquérir la Grâce de l'Esprit Saint. En ce temps-là, Dieu l'exigeait d'un homme, et c'est ce que l'on attendait de lui au moment de son départ de ce monde.

Cependant, maintenant que les derniers temps sont arrivés, et à cause de l'abondance de l'anarchie et de l'amour de beaucoup de gens qui se refroidit [6], l'humanité a plus que jamais besoin d'amour et doit être sage afin de ne pas perdre courage et de s'en éloigner. Car aujourd'hui, l'ennemi du genre humain s'efforce par tous les moyens d'éradiquer l'amour du cœur de l'homme et d'en diminuer progressivement l'amour jusqu'à ce que l'homme soit laissé froid, complètement coupé de l'action vitale de l'amour. Dieu cherche de nous maintenant l'amour! Par conséquent, tous nos efforts devraient être dirigés vers son acquisition dans nos cœurs, ce qui n'est possible que par de bonnes œuvres. Car l'amour sans les œuvres est mort... simplement une parole vide qui peut condamner une personne au Jugement dernier, puisqu'un homme trouvé sans amour dans son cœur a seulement dit "amour... amour", alors qu'il était lui-même loin de faire les choses qu'il aurait dû faire devant le Seigneur et son prochain. Il peut même être condamné s'il avait fait un semblant d'œuvre de charité, mais pas en pleine mesure en fonction de sa force, ne faisant pas ce qui lui était possible. L'amour est vivant, mon cher, mais il meurt sans de bonnes œuvres. Les bonnes œuvres sont la force vitale de l'amour. C'est le véritable amour et c'est le seul pouvoir avec lequel une personne peut résister aux tentations, aux épreuves et à l'horreur des derniers temps pendant la domination temporaire de l'Antéchrist sur le monde."

Puis le Père Gabriel m'a regardé avec son habituelle attention joyeuse après qu'il eut fini de parler. Nous sommes restés tranquillement assis en silence pendant un moment, quand soudain le visiteur suivant a crié : "Par les prières de nos saints pères..." Le Père Gabriel répondit "Amen", permettant au visiteur d'entrer dans sa cellule. Il me bénit d'un sourire et me dit : "Eh bien, mon cher, va en paix, au Nom du Christ." Après avoir reçu sa bénédiction, j'ai quitté sa cellule et je suis rentré chez moi.

Il est très difficile d'exprimer à quel point j'ai été heureux de tout ce qui s'est passé, et j'ai été étonné que le Père Gabriel m'ait trouvé digne de partager un discours aussi remarquable avec moi. J'ai été ravi par les paroles gracieuses du staretz. Car chaque mot, même le plus ordinaire, avait une signification si profonde et sonnait si extraordinaire et si doux !... Ses paroles m'ont apporté beaucoup de joie, de paix et surtout un grand sentiment d'amour et de vitalité. Alors que je contemplais ce qu'il disait, une certaine beauté, une brillance et un silence m'enveloppaient. Mon esprit devint clair et libre en considérant ce que le Père Gabriel m'avait dit, et je commençai lentement à comprendre le sens profond de ses paroles, que je ne comprenais pas dans sa cellule. Mon incapacité à saisir ces choses quand il me parlait, comme je l'ai déjà dit, était due à sa merveilleuse simplicité et à son incroyable humilité. J'ai été d'autant plus étonné que je me rappelais les paroles du Père Gabriel concernant la théosis, et je me suis rendu compte que le staretz avait parlé de la théosis à partir de sa propre expérience de celle-ci. Cela m'a profondément impressionné lorsqu'il m'a dit : "Voici, c'est comme je suis", et qu'il a frappé doucement sa tête deux ou trois fois avec ses doigts. Le staretz devait le faire parce qu'il voyait mon ignorance totale des choses dont il parlait, et ce faisant, il m'a fait comprendre quelque chose qui m'avait été totalement incompréhensible. Par la suite, j'ai commencé à saisir les choses dont il avait parlé, mais pas en pleine compréhension. Cette expérience, pour moi, a été le fruit de la divinisation du staretz.
J'ai été également étonné par son enseignement concernant l'Échelle de l'Ascension Divine, dont l'Église a hérité de Saint Jean Climaque... que le dernier échelon de l'échelle soit plus qu'un simple échelon, mais la "couronne de tous". Le Père Gabriel a dit que cette couronne de toutes les vertus, l'amour, est ce qu'il faut pour atteindre la théosis. Le Père Gabriel a déclaré que Dieu lui avait réservé de révéler ces choses, et que personne d'autre que lui ne pouvait le dire. Le staretz parlait de ces choses de telle sorte qu'il cachait la détresse, l'anxiété et la tristesse dans son cœur, ce qui était le résultat du fait que personne n'avait encore déclaré ces choses. J'ai l'impression que le sujet le plus important dont il a parlé était la Parabole des Dix Vierges, dont cinq ont perdu leur salut, selon le Père Gabriel, à cause de leur manque d'amour. C'est l'interprétation finale de la parabole, qui est pour nous l'appel et la demande de Dieu que nous luttions de toutes nos forces pour acquérir l'amour.

Cette exigence d'amour est quelque chose qui a été réservée par le Seigneur pour ces temps difficiles, car aujourd'hui elle est plus urgente que jamais, même depuis l'entrée de notre Sauveur Jésus Christ dans l'histoire de l'humanité. Pleine de joie de l'expérience de ce discours du staretz, j'ai eu un fort désir de rencontrer immédiatement des amis. Sur le chemin du retour vers Tbilissi, je ne suis pas allé directement chez moi, mais j'ai rendu visite à la famille d'un ami proche qui connaissait bien le Père Gabriel. Ils ont été ravis de tout ce que j'ai partagé avec eux, et ont passé quelques heures à parler du staretz et des choses liées à ce qu'il m'avait dit.

Il était déjà tard quand je suis rentré chez moi. Bientôt, mon frère aîné, qui connaissait lui aussi le père Gabriel, est rentré du travail. J'ai tout raconté à mon frère sur ce que le staretz m'avait dit. Plus tard dans la soirée, j'ai eu le désir de revisiter une traduction du Nouveau Testament produite par le Stockholm Institute for Bible Translation. J'avais acheté ce Nouveau Testament il y a quelque temps, mais il n'avait pas été ouvert, car j'avais entendu parler de ses nombreuses erreurs et de sa traduction imprécise. Pour cette raison, je n'avais jamais eu le désir de le lire.

Je me suis levé, j'ai sorti le Nouveau Testament du tiroir dans lequel je le gardais, et je l'ai ouvert par hasard au tout début de l'Évangile de saint Jean, qui dit : Au commencement était la Parole, et la Parole était avec Dieu, et la Parole était Dieu [7]. Au fur et à mesure que je lisais, j'étais de plus en plus convaincu que les rumeurs concernant l'édition de Stockholm n'étaient pas tout à fait exactes. Cela dit, cela ne se compare en rien à la traduction du Nouveau Testament en ancien géorgien. J'ai finalement commencé à lire certains des autres chapitres qui suivent les quatre livres de l'Evangile. J'atteignis bientôt le livre de l'Apocalypse, qui commence ainsi : La révélation de Jésus-Christ, que Dieu lui a donnée pour montrer à Ses serviteurs ce qui doit se passer bientôt [8]. En poursuivant ma lecture, je me suis souvenu des paroles du Père Gabriel : " Ce n'est pas notre affaire de savoir qui a atteint cet état, mais nous en connaissons un avec certitude : Saint Jean le Théologien. " Le verset d'ouverture de l'Apocalypse semblait être une affirmation extraordinaire des paroles du staretz. C'était comme un petit miracle pour moi... un miracle qui m'a convaincu que tout ce que le Père Gabriel m'avait dit était absolument vrai. C'était comme si la preuve en était le Nouveau Testament lui-même, qui, inspiré par Dieu, confirmait la vérité du discours du staretz.

Il est difficile d'exprimer l'état de mon âme lorsque j'ai entrepris d'écrire ce récit du staretz. Je déclare devant le Seigneur que l'idée d'écrire cette histoire n'était pas le fruit de l'orgueil. Une telle idée évoquait plutôt en moi des sentiments d'indignité, et c'est d'autant plus la raison pour laquelle j'ai écrit ceci.

Grâce à Dieu, j'ai pu comprendre, au moins en partie, ce que le Père Gabriel m'a expliqué, et qu'il avait lui-même atteint la théosis... que j'ai pu comprendre ce qu'est la théosis et comment y parvenir... que l'amour et le seul amour, la couronne de toute vertu, est la théosis, dont Dieu fait don à ceux qui ont atteint le dernier échelon de l'échelle du Saint-Jean - foi, espérance et amour. Que Dieu ait réservé une telle révélation au Père Gabriel, c'est une merveilleuse providence.

Il convient également de mentionner à nouveau l'interprétation du Père Gabriel de la Parabole des Dix Vierges, qui nous enseigne que la chute des cinq vierges folles est due à leur manque d'amour. Telle est l'interprétation finale de cette parabole donnée par le Seigneur. Chaque interprétation de cette parabole a été donnée à l'humanité aux étapes appropriées de l'histoire, et elle a englobé et révélé les choses les plus profondes et incompréhensibles de la Providence de Dieu dans le destin de l'humanité. Ceci atteste que les enseignements du Verbe incarné, notre Seigneur Jésus-Christ, ont été déclarés à tous à chaque époque de l'histoire.

Cette interprétation finale de la parabole enseigne que ceux qui vivront vers la fin des temps sont mandatés par Dieu pour chercher et gagner l'amour, parce qu'en lui se trouve la seule puissance qui peut sauver de la folie de l'esprit de l'Antéchrist, des tentations de l'époque et de l'esclavage qui aura lieu pendant la terrible domination du monde de l'Antéchrist.

La contemplation de tout ce qui est écrit ici m'a amené à penser qu'il était nécessaire d'écrire ce que j'avais entendu. C'est ce sens des responsabilités qui m'a amené à rédiger ce récit, malgré le fait que j'avais peur d'être celui à qui on avait confié la tâche de le rédiger. J'avais peur devant Dieu quand j'ai finalement pris la décision de rendre compte de ces choses. Je me suis dit : " Et si tu oubliais tout ce que tu as entendu ? Est-ce que ces choses étaient destinées à toi seul ? N’as-tu pas peur de répondre devant le Christ pour ne pas avoir agi ?" De plus, j'aurais honte devant le Père Gabriel, ce staretz céleste, si j'oubliais sa précieuse discussion et son enseignement.


Ecrire cette histoire n'a pas été facile pour moi, car ce fut un processus long, difficile et complexe qui m'a pris environ quatre ans de lutte intérieure, car je voulais exprimer ces choses de manière à ne pas lasser les lecteurs. Et finalement, je suis devenu déterminé à publier le merveilleux discours du Père Gabriel. Que le Père Gabriel et les lecteurs me pardonnent si je n'ai pas réussi à exprimer quelque chose correctement et de manière compréhensible. Gloire à Dieu. Amen !


Version française Claude Lopez-Ginisty 
d’après 


NOTES
1. Un catholicon est l'église principale d'un monastère orthodoxe.
2. L'Église orthodoxe utilise principalement la version grecque de l'Ancien Testament connue sous le nom de Septante (aussi connue sous le nom de LXX) plutôt que les traductions des éditions hébraïques. La numérotation des psaumes dans la Septante diffère de celle des traductions basées sur les éditions hébraïques. Le Psaume 50 dans la Septante est le Psaume 51 dans l'édition hébraïque. ↩
3. Psaume 50:8 ↩
4. Les traductions grecques et russes de ce texte parlent de la relation d'une flamme individuelle et du feu dont elle fait partie comme μια γλώσσα φλογός & язык огня ou 'une langue de feu', qui implique une unité directe et complète. Je ne l'ai pas traduit directement […], car cette terminologie peut être inhabituelle pour de nombreux [lecteurs] et peut amener certains lecteurs à la confondre avec le phénomène des " langues de feu " mentionnées dans les Actes des Apôtres - note du traducteur. ↩
5. Ceci, bien sûr, le staretz l’a dit pour moi - note de l'auteur. ↩


6. Matthieu 24:12 ↩
7. Jean1:1 ↩

8.Apocalypse 1:1 ↩



mercredi 23 janvier 2019

Psaume 150: Musique de la Bible restituée

Susan Haïk-Ventura a passé trente ans de sa vie a rechercher la musique avec laquelle le saint Roi et Prophète David accompagnait ses psaumes. Au bout d'une longue recherche inspirée, elle a su interpréter les signes qui se trouvaient dans le texte hébreu et qui n'étaient pas des marques de voyelles, mais des sortes de neumes. Voici l'interprétation du Psaume 129/130 reconstituée par ses soins. Elle a aussi déchiffré le Cantique des Cantiques qui existe en CD dans une magnifique interprétation d'Esther Lamandier.




mardi 22 janvier 2019

L'hexapsalme des Matines et l'extinction des cierges


Quand elles sont officiées dans le cadre des Vigiles, les Matines commencent par la lecture de l'Hexapsalme (Six Psaumes), c'est-à-dire des Psaumes 3, 37, 62, 87, 102 et 142, lus dans cet ordre, et réunis dans un seul ensemble.

Les fidèles doivent être conscients du fait que la lecture de l'Hexapsalme est l'un des points les plus importants des Vigiles, un temps où tous doivent mettre de côté les pensées profanes, se calmer, et se concentrer sur ces prières de pénitence. La lecture ne constitue pas une pause dans les services divins, une période pendant laquelle [on peut] aller faire une promenade à l'extérieur, ou parler à son voisin. C'est l'un des moments les plus sacrés dans l'ensemble des Vigiles.

Les Six Psaumes comprennent une gamme entière d'expériences qui illuminent la vie chrétienne du Nouveau Testament - et pas seulement son humeur joyeuse dans l'ensemble, mais aussi le chemin douloureux de cette joie.

C'est pourquoi selon les rubriques de l'Eglise, les cierges dans l'église doivent être éteints. L'obscurité tombée symbolise le plus fort de la nuit au cours de laquelle le Christ, loué dans le chant des anges: "Gloire à Dieu au plus haut des cieux", est venu sur terre. La semi-obscurité de l'église facilite grandement la concentration dans la prière.

Dans son livre référence qui fait autorité Le Nouveau Testament, ou Explications de l'Église, de la Liturgie, et de tous les offices de l'Église et de ses meubles, publié à Saint-Pétersbourg en 1908, Vladika Benjamin de Nijegorod et Arzamas explique l'extinction des cierges pendant l'Hexapsalme de cette façon: "Selon le typicon, au cours de cette lecture les cierges sont éteints. Ceci est fait afin que nous, incapables de voir quoi que ce soit de nos yeux, nous puissions écouter les Six Psaumes avec attention et crainte [de Dieu] et afin que tout le monde debout dans le noir, puisse verser une larme et exhaler un soupir. Car la nuit, et s'il n'y a pas de cierge allumé à proximité, il est difficile pour les gens de se voir les uns les autres. C'est pour cette raison que le typicon l'ordonne: ainsi on prononce le Six psaumes avec toute notre attention et la crainte de Dieu, comme si l'on conversait avec notre Dieu invisible le Christ Lui-même, et en priant sur nos péchés. "

Au milieu de l'Hexapsalme, au début du 4e psaume, le plus rempli de tristesse et d'amertume extrême, le prêtre quitte l'autel et, debout devant les Portes Royales, continue à lire tranquillement les 12 prières  "matinales" prévues. À ce moment, le prêtre symbolise le Christ, qui, après avoir entendu la douleur de l'humanité déchue, non seulement descendit [sur terre], mais à la fin partagea également les souffrances dont parle le Psaume 87.

Les prières "matinales" tranquillement lues par le prêtre incluent des prières pour les chrétiens qui se tiennent dans l'église, demandant que soient pardonnés leurs péchés, qu'il leur soit donné la vraie foi et un amour sincère, que toutes leurs œuvres soient bénies, et qu'ils soient rendus dignes du Royaume des Cieux.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
http://www.stjohndc.org/Russian/what/e_SixPsalms.htm

lundi 21 janvier 2019

Psautier et intercession


Tombe du Roi David au Mont Sion


Les Psaumes du Saint Prophète David

(Extrait du livre 
LE PSEAUTIER DE DAVID 
traduit en François 
avec des notes courtes tirées de Saint Augustin 
et des autres Pères, 
Paris 1674)


Nota Bene: La numérotation est celle des Septante.

+

Psaumes que l’on peut dire quand on est triste:

76, 83, 87, 101.

Psaumes que l’on peut dire quand on est dans la joie:

31, 33, 65, 80, 84.

Psaumes de louange:

8, 65, 74, 91, 102, 144, 93.

Psaumes de confiance:

10, 26, 22, 46, 63, 70, 42, 63.

Psaumes de consolation:

24, 36, 65.

Psaumes quand on est touché d’admiration de la grandeur de Dieu:

8,103, 138, 144.

Psaumes d’instruction:

1, 2, 5, 14, 39, 72, 77, 100, 101.

Psaumes d’action de grâces:

9, 17, 29, 88, 115, 117, 143.

Psaumes pour apaiser la colère de Dieu:

6, 37, 73, 84, 76.

Psaumes contre les calomnies:

25, 30, 34, 51.

Psaumes pour déplorer les maux de l’Eglise:

73, 78, 79, 82.

Psaume pour ne pas se scandaliser de la prospérité des méchants: 

72

Psaumes pour repasser les dons de Dieu en sa mémoire:

43, 77, 88, 106, 115.

Psaumes pour s’exciter à soupirer vers Dieu:

41, 83, 136.

Psaumes contre la persécution des ennemis:

3, 7, 16, 53, 56, 88, 1139, 140, 141.

Psaume pour se soumettre à la conduite que Dieu tient sur nous:

61.

Psaumes de pénitence:

6, 31, 37, 50, 101, 129, 41.

Fin etGloire à Notre Dieu!

vendredi 11 janvier 2019

Psaumes de Salomon

Saint Roi Salomon

Psaumes de Salomon Dictionnaire Biblique Westphal



Collection de 18 psaumes écrits en grec, primitivement peut-être en hébreu. Sous le rapport de la forme, et en partie aussi par les sujets qu’ils traitent, ils rappellent nos psaumes bibliques. Le Canon de l’AncienTestament (voir article) étant clos quand parurent ces nouveaux psaumes, on ne pouvait les attribuer à David. On choisit donc comme nom d’auteur son successeur, le roi Salomon, dont la réputation de grand écrivain, de sage et de serviteur de Yahvé était établie par l’histoire sacrée et par une série de livres qui avaient trouvé place dans le Canon grâce au nom de ce roi inscrit à la première page. La coutume de la pseudépigraphie générale, dans les siècles antérieurs et postérieurs à la naissance du christianisme, a permis d’user plus tard encore du nom de Salomon. C’est sous son égide que parut un autre groupe de chants découverts depuis peu : les Odes de Salomon (voir Pseudépigraphes). Dans certaines listes de livres canoniques on a rapproché les Odes et les Psaumes de Salomon et on les a placés à la fin du Nouveau Testament : l’Alexandrinus nomme les Psaumes après les Clémentines ; les LXX les ont insérés entre la Sapience et le Siracide. Les Psaumes eux-mêmes ne renferment pas une ligne ayant quelque rapport avec le Salomon de l’histoire.


Les sujets traités dans ces chants varient comme c’est aussi le cas dans les psaumes du Canon. À côté des cantiques de bénédiction, il en est d’autres qui respirent la haine et la vengeance (Psaume de Salomon 4). Les lamentations alternent avec les actions de grâces. Parfois, comme au Psaume de Salomon 8, l’auteur fait le récit des malheurs qui frappent Jérusalem et les explique comme un juste châtiment de Dieu. Dans une partie des psaumes c’est une seule personne qui parle au singulier ; dans d’autres l’emploi du pluriel montre qu’il s’agit d’une collectivité, d’où l’on a conclu que ces chants servaient aussi au culte synagogal.


Les idées eschatologiques ne sont pas absentes de notre livre, bien qu’elles y soient moins dominantes que dans les apocalypses proprement dites. L’attente messianique est au premier plan dans les Psaume de Salomon 17 et Psaume de Salomon 18. Le Messie attendu est le roi, fils de David, qui régnera sur un peuple délivré de tous ses ennemis. C’est sur le terrain politique et national que se déroule toute l’espérance du psalmiste, et il est remarquable qu’à l’opposé des autres documents du judaïsme préchrétien, qui ignorent le Messie davidique ou n’en font que peu de cas, il revit ici grâce à l’action d’une épouvantable catastrophe nationale sur la piété du psalmiste. Le coloris transcendant de l’eschatologie, qui est la caractéristique des œuvres apocalyptiques, manque totalement dans les Psaumes, si l’on fait abstraction des passages relatifs à la résurrection. C’est pourquoi il ne faudrait point les ranger parmi les Apocalypses, avec lesquelles ils n’ont de commun que la pseudépigraphie.


À la différence de la plupart des pseudépigraphes de l’Ancien Testament, dont la rédaction ne saurait être datée qu’approximativement, on peut dater les Psaumes de Salomon, du moins plusieurs d’entre eux (Psaume de Salomon 8, 17), d’une façon très précise. En effet, quelques événements bien connus dans l’histoire de Rome y sont mentionnés : l’arrivée du général romain Pompée aux portes de Jérusalem, le siège et l’occupation de la ville et de son sanctuaire (63 avant Jésus-Christ). Le Psaume de Salomon 2 connaît les circonstances spéciales qui ont accompagné la mort du triumvir romain (an 48). L’auteur fut donc de la génération qui précéda immédiatement la naissance de Jésus. La position qu’il occupa au sein de la vie politique juive est déterminée par ce fait qu’il se rattachait au parti des pharisiens. Son cœur saigne de l’abaissement de sa patrie. Il se tourne avec animosité et aigreur contre ceux qui ont favorisé l’invasion étrangère, tout d’abord contre les Hasmonéens, les instruments de Rome, et aussi contre ses compatriotes renégats qui, ayant abandonné leur Dieu, sont devenus les esclaves des hommes. Il prône le retour à l’obéissance de la Loi. Elle est la norme qui sépare la nation juive en deux camps : les justes et les impies. Aux premiers seuls est promise la résurrection (Psaume de Salomon 3.13 ; Psaume de Salomon 3.16). Les impies sont voués à la perdition éternelle. L’idéal de la parfaite soumission à la Loi c’est le Messie, sans péché lui-même, qui le réalisera dans son royaume. Tous les impurs en seront exclus (Psaume de Salomon 17). L’ouvrage permet de se faire une idée exacte de la piété pharisaïque, telle qu’elle s’était développée quand Jésus parut. L’antagonisme entre lui et les pharisiens, dont les Évangiles révèlent le caractère tragique, en fut la conséquence fatale. La polémique de l’apôtre Paul contre la justice légale s’éclaire d’une lumière nouvelle quand, à l’encontre des déclarations de ses épîtres, notre psalmiste dit textuellement Psaume de Salomon 14.2 et suivants) que Dieu donna la Loi pour nous faire vivre, que les Saints du Seigneur auront en elle la vie éternelle ». G. B.

jeudi 10 janvier 2019

Saint Jean Chrysostome: commentaire du psaume 150


Que tous les membres de notre corps louent Dieu et forment un concert en son honneur.

Ces paroles s'appliquent, soit au peuple, soit à la vie sainte, et aux saints. Or voyez comme ici encore, pour terminer son livre des psaumes, le Psalmiste parle de l'action de grâces, nous montrant, par là, que tel doit être le commencement, et telle doit être la fin de nos actions et de nos paroles. Aussi saint Paul disait: « Quoi que vous fassiez , ou en paroles ou en actions , faites tout au nom du Seigneur Jésus-Christ, rendant grâces par Lui, à Dieu le Père.» (Col. III, 17. ) C'est ainsi que commence notre prière. 

En effet, dire, «Notre Père, » c'est rendre grâces pour les dons que l'on a reçus, et pour les indiquer, il suffit de prononcer ce nom. Dire, « Notre Père, » c'est reconnaître l'adoption des enfants ; reconnaître l'adoption des enfants, c'est proclamer la justice, la sanctification, la rédemption , la rémission des péchés, tous les dons du Saint-Esprit. 

Il faut en effet, que tous ces bienfaits précèdent pour que nous jouissions de  l'adoption qui nous fait enfants de Dieu, pour que nous méritions d'appeler Dieu, notre Père. Mais il me semble que le Psalmiste insinue encore une autre pensée, quand il dit: « Dans Ses saints. » Cela veut dire par le moyen de Ses saints; donc rendez grâces à Dieu de ce qu'il a introduit parmi les hommes une telle forme de vie; de ce que, des hommes, il a fait des anges; aussi, après avoir dit. « Dans Ses saints , » le Psalmiste ajoute : « Louez-Le dans le firmament où il fait éclater Sa puissance, » montrant par ces paroles ce que j'ai déjà dit. 

Car les saints sont plus chers à Dieu que Son firmament. Car le ciel est fait pour l'homme , et non l'homme pour le ciel. Maintenant un autre texte, au lieu de, « Dans le firmament, » porte « Dans l'indestructibilité; » un autre: « Dans le firmament de sa puissance. » Or, le Psalmiste me paraît ici avoir encore une autre pensée, comme dans l'avant-dernier psaume. Là, en effet, il dit; « Louez-Le, vous tous qui êtes Ses anges. » (Ps. CXLVIII, 2.) Ici, « Louez-le, dans Son firmament, » c'est-à-dire, vous qui êtes dans Son firmament; le Psalmiste ne se lasse pas d'inviter les puissances supérieures à s'associer à l'élan de ses louanges. « Louez-le dans les effets de Son pouvoir (2) ; » un autre: « Par Ses puissances.» L'hébreu dit: « Begeburothau. » Voici la pensée: louez-le , à cause de tout ce qu'il a de puissance, à cause de Sa force, à cause de Ses miracles, à cause de Son pouvoir, qu'il manifeste par toutes les créatures; par celles qui vivent sur la terre, par celles qui vivent dans les cieux; par les oeuvres générales , par les oeuvres particulières : à chaque instant, et toujours. Louez-Le, « selon l'étendue de Sa grandeur. » 

Est-ce possible, et quelles louanges pourraient égaler Sa grandeur? Le Psalmiste ne dit pas, une louange qui égale; (311) mais, dit-il, selon que vous pouvez comprendre l'immensité de cette grandeur, vous devez la louer, dans la mesure de vos forces, autant qu'une louange , digne de Dieu , de cette incomparable grandeur, peut sortir de la bouche d'un homme. Nul en effet, ne peut dignement louer Dieu. 

Avez-vous compris la passion de cette âme sainte? avez-vous compris le feu qui la brûle, qui la tourmente, qui l'excite, qui lutte pour surmonter la naturelle faiblesse ; pour s'élancer de la terre au ciel; l'ardeur de l'âme attachée à Dieu, qu'un désir brûlant jette dans le sein de Dieu? « Louez-Le, au son de la trompette ; » un autre texte: « Au son de la trompe. Louez-Le, avec le psaltérion et la harpe; » un autre: « Avec le nablum, (espèce de harpe) , et la lyre ; louez-Le avec le tambour, et dans les chœurs ; louez-Le avec le luth et avec l'orgue; » un autre texte: « Avec des cordes et avec la harpe ; «Louez-Le, avec des cymbales harmonieuses; « louez-Le avec des cymbales de jubilation. » Un autre: « Avec des cymbales de signification,. « Que toute souffle loue Le Seigneur. » Un autre texte: « Que toute respiration. » Il excite tous les instruments; il veut les entendre tous offrir à Dieu leur mélodie , il leur communique à tous la chaleur qui le brûle; il les réveille tous.

Eh bien donc ! de même qu'il ordonne aux Juifs de louer Dieu par tous les instruments, de même il nous prescrit, à nous , de Le louer par tous nos membres: par nos yeux, par notre langue, par nos oreilles et par nos mains; ce que saint Paul, de son côté, exprime ainsi: « Offrez vos corps comme un sacrifice vivant, saint, agréable à Dieu , pour Lui rendre un culte raisonnable. » (Rom. XII, 1.) 

La louange qui vient de l'oeil, ce sont des regards dont rien n'altère la pureté ; la louange de la langue, ce sont les psaumes ; la louange de l'oreille, c'est l'ignorance des chants impurs, des discours qui accusent le prochain; la louange que fait la pensée, c'est la simplicité qui ne connaît pas la ruse, et n'admet que la charité. Les pieds louent le Seigneur, lorsqu'ils ne courent pas au vice, mais aux bonnes oeuvres ; les mains louent le Seigneur, quand elles ne s'abandonnent ni au vol , ni aux rapines, ni aux coups, ni aux violences; quand elles s'emploient à l'aumône, à la défense des opprimés. L'homme devient alors une harpe harmonieuse d'une mélodie ravissante, spirituelle, qui s'élève à Dieu. Maintenant, ces instruments dont nous avons parlé, furent permis aux Juifs, à cause de la faiblesse de leur esprit; on voulait les maintenir dans la charité , dans la concorde, les exciter à faire avec ardeur ce qui leur procurerait le salut. Dieu voulait, en leur permettant les plaisirs de ce genre, les amener à des désirs plus élevés. 

Dieu comprenait combien ces Juifs étaient grossiers, lâches, déchus, et il voulait les réveiller , les consoler de l'assiduité qu'il leur demandait, par les douceurs de la mélodie. Et maintenant que veut dire, « Les cymbales de la signification? » Ce sont les psaumes. Et en effet, ils ne frappaient pas simplement les cymbales, ils ne jouaient pas simplement de la harpe, mais, autant que faire se pouvait, par les cymbales, par les trompettes, par la harpe, ils montraient le sens des psaumes, et le travail, et le zèle dont ils faisaient preuve dans ces exercices, leur était d'une grande utilité. « Que tout souffle « loue le Seigneur. » Après avoir invité au concert de louanges les créatures célestes; après avoir réveillé le zèle du peuple , excité tous les instruments, Il s'adresse à la nature entière, Il invite tous les âges à ce concert vieillards, hommes faits, jeunes gens, adolescents, femmes, et généralement, sans exception aucune, tous les habitants de la terre; Il jette déjà les premières semences du Nouveau Testament, en s'adressant à ceux qui sont répandus sur toute la surface de l'univers. 

Donc ne nous lassons pas de louer Dieu , de Lui rendre, pour toutes choses, des actions de grâces, et par nos paroles, et par nos actions. Voilà , en effet, notre sacrifice , notre oblation ; voilà le ministère par excellence, le digne emploi d'une vie réglée sur le modèle des anges. Et si nous persévérons ainsi à louer Dieu, nous passerons, sans aucune offense, la vie présente , et nous acquerrons les biens à venir. Puissions-nous tous nous les voir accordés , par la Grâce et par la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, à Qui appartiennent, comme au Père, comme au Saint-Esprit, la gloire, la puissance, l'honneur, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles. Amen!

Traduction adaptée 
de la version de M. Janin
Bar-Le-Duc 
1864


mercredi 9 janvier 2019

Saint Athanase sur les Psaumes


"Le livre des psaumes a une certaine grâce propre et réclame une attention toute spéciale. 

Outre ce qu'il possède de commun avec les autres ouvrages de la Bible, il a en propre de receler tous les mouvements de l'âme, ses changements et ses redressements, convenablement exprimés et montrés... 

A celui qui court après la vertu et veut savoir comment Notre Seigneur s'est conduit durant sa vie mortelle, ce livre divin rappelle en priorité ce que sont les mouvements de l'âme... 

Dans l'affliction, sa lecture apporte une grande consolation; dans la tentation et la persécution, on en tire une plus grande résistance et l'on est protégé par le Seigneur qui a protégé l'auteur du psaume... 

Dans le péché, on rentre en soi-même et l'on renonce; sans péché, on se trouve dans la joie parce qu'on tend vers les biens qui nous sont offerts. Dans la lutte, le chant des psaumes procure la force... 

Qu'ils soient aussi l'objet de ton occupation; lis-les avec sagesse et tu pourras, conduit par l'Esprit, comprendre le sens propre de chacun. Tu imiteras la vie des saints qui, portés par la vie de Dieu, ont écrit ces textes." 

(Lettre à Marcellin)

dimanche 6 janvier 2019

Métropolite Hilarion [Alfeyev]: conférence à l’Université de Fribourg (25 mars 2011)



Le 15 mars 2011, le métropolite Hilarion de Volokolamsk s’est rendu à la Faculté de musique de l’Université de Fribourg, où il a prononcé une conférence sur le thème « Les psaumes dans la tradition orthodoxe ». L’auditoire se composait du cardinal Kurt Koch, président du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, les enseignants et étudiants de l’Université de Fribourg.

Lire la suite ICI


samedi 5 janvier 2019

S. Gillingham : Psaumes 90-92 : texte, images et musique

41Le psautier est traditionnellement compris comme un ensemble de 5 livres ; les psaumes (Ps) 90-106 constituent la 4partie et se caractérisent par la mise en avant de la figure de Moïse. Un thème commun à ce groupe de psaumes est la fragilité humaine, face à la souveraineté du Dieu de l’alliance perçu comme un refuge sûr. Cette affirmation dans les Ps 90-92 va de pair avec l’expression de la plainte du psalmiste.
42[...]
43Dans le Ps 90, on trouve plusieurs références à Moïse et son histoire, ce que souligne clairement le Targum ; la tradition juive postérieure donne Moïse comme auteur des Ps 90-100, en lien avec chacune des tribus d’Israël (Ps 90 pour Ruben, selon le midrash). Dans le judaïsme encore, ce psaume est utilisé lors des funérailles (comme d’ailleurs les Ps 91-92). Les commentateurs chrétiens anciens du Psautier comme Basile ou Athanase mettent plutôt en valeur l’image du Dieu refuge. Pour l’époque moderne, l’auteur cite l’hymne d’Isaac Watts (1719), qui amplifie cette célébration du Dieu refuge, et cet hymne est encore utilisé officiellement au Jour du Souvenir ou lors de funérailles nationales en Angleterre. Mais il y a aussi des versions poétiques « privées », comme celles de Robert Burns et Francis Bacon. Deux interprétations musicales sont signalées, celle d’Elgar et celle de Charles Ives à partir de la Bible King James.
44Dans le Ps 91, Dieu délivre du mal. Le Tg lit dans ce Ps un dialogue entre David (v. 2-8) et Salomon (9-13), les derniers versets donnant la parole à Dieu. On a découvert une proximité notable de ce Ps avec un texte phénicien du 7e s. avant notre ère (prière pour demander l’aide des divinités), un texte dont il était fait un usage apotropaïque ; or à Qumran, le Ps 91 est donné comme le 4e psaume d’exorcisme. Cet usage apotropaïque est confirmé par plusieurs points de la traduction de la LXX – ce qui apporte un éclairage sur la manière dont le Ps 91 est cité dans le récit des tentations de Jésus. Dès les premiers siècles chrétiens, ce Ps est repéré comme un texte d’exorcisme, il est par exemple utilisé sur des linteaux de porte en Syrie, Chypre et dans deux églises byzantines de Ravenne. Les v. 4-5 et 11 se trouvent sur des amulettes (datées des 6e-12e s.). On peut comprendre alors que depuis le 6e s., le Ps 91 avec les Ps 4 et 134 soit au cœur de la liturgie de complies (protection du Christ contre les démons de la nuit). Dans les enluminures (Psautier d’Utrecht), le Ps 91 est illustré par des représentations du Christ foulant des démons de forme animale (cf. les images du texte). Au plan de la création musicale, plusieurs versets sont repris dans l’Elijah de Mendelssohn, ou encore par un compositeur juif contemporain, Allon Wallach, ainsi que dans l’album Theology de Sinead O’Connor.
45Le Ps 92 a pour titre « Chant pour le shabbat », ce que confirme la Mishnah. Le verset central (v. 8) établit un lien avec le thème de la royauté de Dieu dans le Ps 93. Dans la tradition juive, plus largement, ce Ps est associé à Adam : ainsi pour le Tg, c’est « un Ps qu’Adam offrit le jour du shabbat ». Rachi en donne une interprétation eschatologique. Dans la liturgie juive, il est utilisé pour l’entrée dans le shabbat le vendredi soir ; et pour la Kabbale, les Ps 29, 95-99 figurent les sept étapes de la montée vers l’union mystique avec Dieu. – À l’inverse peu de références au Ps 92 dans le christianisme ancien. Le Psautier d’Utrecht et celui de Saint-Alban illustrent le Ps avec une figure du psalmiste dans un jardin paradisiaque. En musique, on peut signaler l’arrangement musical commandé à Schubert pour ce Ps par Salomon Sulzer, ainsi que le Requiem juif composé par Eric Zeisl en 1945.
46La réception de ces psaumes, au-delà de l’histoire biblique, montre l’universalité de leurs thèmes, tout en maintenant leur lien fondamental avec le judaïsme et le christianisme. Leur réception multiple illustre comment la psalmodie peut contribuer à une « conversation multiculturelle ».

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